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Portraits

Première femme sourde avec un brevet fédéral de cheffe de cuisine

La Fédération Suisse des Sourds SGB-FSS est heureuse de partager une histoire inspirante de réussite : Salome Lienin est la première femme sourde en Suisse à avoir réussi l’examen de cheffe de cuisine avec un brevet fédéral.

Dans l’interview suivante, elle donne un aperçu fascinant de son parcours professionnel, de ses défis et de ses succès :

Madame Lienin, toutes nos félicitations pour votre succès ! Qu’est-ce que cela fait d’être la première femme sourde en Suisse à obtenir le brevet fédéral de cheffe de cuisine ?
Merci beaucoup.
Lorsque j’ai appris que j’avais réussi l’examen, j’ai réalisé que j’avais vraiment atteint ce titre. J’ai dû lire plusieurs fois l’intitulé du titre, et ce fut un moment très émotionnel pour moi.
Il y a 19 ans, j’avais déjà tenté de suivre la formation de cuisinière en gastronomie, mais peu avant l’examen, j’ai abandonné en raison de la pression.

Comment s’est dérouvée votre recherche d’une place d’apprentissage ? Quels obstacles avez-vous dû surmonter ?
J’ai dû faire deux stages d’observation avant d’obtenir une place d’apprentissage, car l’équipe était d’abord incertaine du fait que je sois sourde. Mais au final, ils ont été totalement conquis par mes compétences.

Comment avez-vous vécu votre apprentissage ?
Cela fait presque 30 ans que j’ai commencé mon apprentissage. J’ai eu la chance d’être dans une petite équipe : il y avait seulement le chef, deux cuisiniers, une employée de cuisine et le plongeur. Ils venaient de cultures diverses, ce qui était un avantage, et parlaient beaucoup l’allemand standard. Au fil du temps, après des travaux d’agrandissement, plusieurs nouveaux collaborateurs ont rejoint l’équipe, mais tout s’est très bien passé. Honnêtement, j’ai passé un bon moment durant mon apprentissage.

Quel soutien avez-vous reçu pendant votre formation, et qu’auriez-vous aimé avoir en plus ?
Je n’avais pas accès à un interprète pendant ma formation. Lors des réunions d’équipe, il n’y avait jamais d’interprète, alors que j’aurais aimé participer et suivre les discussions. Même lors des cours d’introduction, aucun interprète n’était présent. Si j’avais su que c’était possible d’en avoir un, j’en aurais demandé un.

Vous travaillez comme cuisinière depuis plus de 20 ans. Comment le secteur de la gastronomie a-t-il évolué au fil du temps ?
Le secteur de la gastronomie a beaucoup changé ces 29 dernières années. De plus en plus de mesures ont été mises en place concernant les allergies, ainsi que les régimes végétariens et végétaliens. Les contrôles sur la déclaration des ingrédients et l’hygiène sont devenus plus stricts. De plus, l’accent est mis sur la nutrition et le développement durable.

Avez-vous vécu des discriminations dans votre travail ? Si oui, comment les avez-vous gérées ?
Oui, lors d’un entretien d’embauche, on m’a dit qu’on m’aurait engagée si je n’avais pas été sourde. Une personne m’a même recommandé de chercher un travail où je n’aurais pas de contact avec les résidents d’un EMS, en raison des problèmes de communication. Même lorsque j’ai expliqué que mes collègues pouvaient m’aider, on m’a répondu immédiatement : « Non, c’est trop stressant. » J’ai été très frustrée par cette réaction.

Comment communiquez-vous avec vos collègues entendants en cuisine ?
J’ai de bons souvenirs de la collaboration avec mes collègues, mais aussi quelques expériences négatives. Certains préféraient parler à mes collègues plutôt qu’à moi. Aujourd’hui, la situation est très bonne. Quand mon chef est absent, je suis responsable de la cuisine et mes collègues s’adressent directement à moi. S’il y a un appel téléphonique, mes collègues me le traduisent. Nous utilisons aussi WhatsApp pour organiser les desserts du jour au lieu de téléphoner.

Existe-t-il des stratégies ou outils spéciaux qui vous aident au quotidien ?
Une alarme lumineuse a été installée sur mon lieu de travail pour signaler un incendie et me permettre de réagir rapidement.

Qu’appréciez-vous le plus dans votre travail actuel ?
(Note de la rédaction: Diakonissen Mutterhaus St. Chrischona à Bettingen/BS)
Cela fait bientôt 10 ans que j’y travaille. Je m’y sens bien, mes collègues me soutiennent et ont une totale confiance en moi. Ils me traitent comme n’importe qui d’autre.

Quel est votre plat préféré à cuisiner et pourquoi ?
J’aime surtout cuisiner des plats chauds, notamment les viandes mijotées comme le rôti de boeuf ou l’osso buco (jarret de veau), car ils ont un goût délicieux et une texture tendre.


Cette histoire inspirante montre qu’avec de la persévérance et de la passion, il est possible de réaliser de grandes choses ! La Fédération Suisse des Sourds félicite chaleureusement Salome Lienin pour son succès !

Salome Lienin en tenue de cuisine.
Salome Lienin in Kochkleidung

Publié le 8. mars 2025